Chaque samedi Les Buvologues vous proposent de découvrir les origines d’expressions du langage courant qui nous viennent de la cuisine. Et cela ne manque pas de sel…
Noble repas
Pendant l’Ancien Régime, seul le noble pouvait offrir un festin à ses invités, ayant un cuisinier sous ses ordres. Aubergiste, tavernier et cafetier n’ont alors pas le droit de proposer de « vraie » cuisine.
Oiseau de nuit, Restif de La Bretonne, écrivain et mouchard, tombe un soir sur un endroit ouvert pour souper : il est déçu par le repas, dans lequel il ne voit « rien de plus restaurant qu’ailleurs », et par l’ambiance : chacun soupe tout seul à sa table. À l’époque, le restaurant n’est pas un lieu mais un mets jugé « salubre et hygiénique » comme, par exemple, le bouillon, aliment des
plus réparateurs (« restaurant », au sens propre) quand ça caille dehors et qu’il fait faim.
premier restaurant
En 1765 à Paris, une ancienne boulangerie donne place à un lieu d’un nouveau genre. Le patron, dit Chantoiseau, est un drôle de zèbre; un peu fripon, il s’habille en seigneur et fraie avec les dineurs mondains. Sur son enseigne, il parodie un verset de l’évangile selon Saint Matthieu : « Venez à moi, vous qui souffrez de l’estomac, et je vous restaurerai ». Tel le réparateur d’œuvres d’art, il promet de « retaper » sa clientèle. Au menu ? Du bouillon, mais aussi des œufs frais, des escargots, du poulet gros sel et le plat signature du patron : les pieds de mouton sauce poulette. Le soir, gens du monde et noceurs viennent se repaître dans ce « clandé » à succès!
restaurons!
L’idée fait des petits : les restaurants se mettent à pulluler. La communauté des traiteurs et des rôtisseurs était jusque-là seule à pouvoir servir des viandes cuites, des plats cuisinés et des charcuteries. Ils jugent ces nouveaux concurrents totalement illégaux. Furax, la corporation demande justice devant le Parlement!
Le jugement tombe : les pieds de mouton sauce poulette ne sont pas considérés comme des ragoûts au sens strict. Les restaurants sont donc autorisés ! Au XIX° siècle, grande période de gastronomie mais aussi de
malnutrition, on compte une variété infinie de lieux qui « restaurent » : bouillons, gargotes, estaminets, crémeries, traiteurs, table d’hôtes, cafés, brasseries, auberges mais surtout des restaurants, affectueusement réduits par apocope en « resto » au XX siècle.
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Extrait de
« 150 Drôles d’expressions de la cuisine qui ne manquent pas de sel »
avec l’amicale autorisation de l’auteure Marcelle RATAFIA
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