« Casser la croûte » : du pain croûte que croûte !


Chaque samedi, Les Buvologues vous proposent de découvrir les origines d’expressions du langage courant qui nous viennent de la cuisine. Et cela ne manque pas de sel…

Comment partager le pain

En 1861, on peut lire dans Le Chemin de l’épaulette, histoire de l’enrôlé volontaire d’Auguste Lecomte, ancien chef d’escadron, les joies quotidiennes du troupier : « La goutte est largement servie, on casse la croûte, et il y a même des cervelas à l’ail pour les plus gourmets! »
Repas rapide pris sur le pouce, le casse-croûte rend hommage à la croustillance du pain qui le compose, tandis que croûter, c’est « manger pour de vrai ». En latin, crusta désigne « ce qui enveloppe » : couche, croûte, écaille… À partir de ce terme générique, le français a formé une famille gutturale : croûton, croustiller, crustacé, mais aussi s’encroûter, qui donne en argot se croûtonner. Dans la langue verte, une croûte est une peinture mocharde, et le croûton, un vieillard sénile et ronchon.

Chers pâtés

Au Moyen Âge, la pâte des pâtés en croûte n’est pas faite pour être mangée, mais sert à conserver les viandes et à faire joli. Pendant la Renaissance, les pâtés deviennent plus raffinés et leurs croûtes se parent de « bon beurre ». C’est au XIX ème siècle qu’est inventé le roi des pâtés en croûte répondant au doux nom d’ « Oreiller de la belle Aurore », une croûte carrée recouvrant un mélange ébouriffant de viandes exquises. La créatrice de ce bijou? Mme Claudine Aurore Récamier, la propre mère de Brillat-Savarin!

Avant l’avènement du jambon-beurre, les casse-croûtes ne manquaient pas : achetés dans la rue, on pouvait se restaurer d’une tartine de brie, d’un bol de tripes ou d’un pâté chaud fourré à la viande. Dans le film Fric-Frac, Michel Simon joue Jo, un truand pantouflard. Gonflé par sa compagne qui demande quand est-ce qu’on mange, il soupire de son grain de voix inimitable : « Pense qu’à croûter, celle-là! » L’ironie veut que le personnage de Jo soit aussi un « julot casse-croûte », ce souteneur à la petite semaine dont la faible autorité ne peut lui garantir un vrai revenu, mais… un simple casse-croûte !

Extrait de
« 150 Drôles d’expressions de la cuisine qui ne manquent pas de sel »
avec l’amicale autorisation de l’auteure Marcelle RATAFIA

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Editions
317 pages, 12,90€

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