« valoir son pesant de cacahuètes » : et de Pastis?


Chaque samedi, Les Buvologues vous proposent de découvrir les origines d’expressions du langage courant qui nous viennent de la cuisine. Et cela ne manque pas de sel…

une question de poids

En France, l’expression valoir son pesant d’or avait cours depuis le XIIIème siècle ; on l’employait pour évoquer la valeur d’un être cher. Une hypothèse veut que le pesant vienne du mot oriental besant, une ancienne monnaie en or de Byzance dont le poids, constant, était de 4,48 g. Mais le besant n’avait qu’une très faible valeur… Cette théorie n’est donc pas avérée. Au XII ème siècle, par ironie, on commença à se moquer de quelqu’un peu talentueux en évaluant qu’il valait son pesant de plomb. Depuis les années 1950, on estime que quelque chose de ridicule ou d’insignifiant vaut son pesant de cacahuètes.

la cacahuète est baladeuse

Quelle voyageuse, cette cacahuète ! Découverte par les conquistadors, elle est adoptée sous son nom d’origine : tlacacahuatl en nahuatl – une langue aztèque –, qui signifie « cacao de terre ». Passée des mains mexicaines aux caravelles des Espagnols, qui l’appellent cacahuete, elle est introduite au Sénégal par des marins portugais au xviie siècle où des comptoirs sont établis sur ses côtes par la France. En 1677, les Français « reprennent » la Gorée aux Hollandais, cette île symbolique de la glaçante histoire de la traite humaine.

L’arachide française est sénégalaise

La cacahuète devient un des produits phares de la cuisine sénégalaise et de sa culture : les colons français encouragent l’exploitation des arachides au détriment d’autres cultures. Avec les innovations de la révolution industrielle, l’huile d’arachide devint très recherchée : elle est utilisée massivement en Europe en qualité de lubrifiant, pour la fabrication du savon, de la cire et autre. Pour maintenir la transformation en huile en France, les négociants français obtiennent de n’exporter que des cacahuètes non décortiquées.

Non contents d’avoir orienté l’agriculture sénégalaise dans le sens de ses intérêts, les Français essaient d’obtenir le fruit de l’arachide à prix cassé. Au moment de son indépendance, le Sénégal est coincé par l’agriculture des cacahuètes, qui occupe un tiers des terres arables. Pour adopter une version moins impérialiste de cette expression, il existe des variantes plus terroir : on dit aussi valoir son pesant de grattons ou de cancoillotte.

Extrait de
« 150 Drôles d’expressions de la cuisine qui ne manquent pas de sel »
avec l’amicale autorisation de l’auteure Marcelle RATAFIA

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Editions
317 pages, 12,90€

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