« Mijoter un sale coup », avant de se mettre à table!


Chaque samedi, Les Buvologues vous proposent de découvrir les origines d’expressions du langage courant qui nous viennent de la cuisine. Et cela ne manque pas de sel…

ça mijote…

Célébrée dans le monde entier pour sa cuisine, la France est fière comme un bar-tabac de ses plats mijotés. Blanquette, navarin ou mironton, les recettes cuites de longues heures sont le symbole d’une cuisine ménagère parfois appelée « bonne femme ». Mais n’est-ce pas plutôt de bonne fame, la « réputation »?

Verbe courant, mijoter apparaît auXVIIème siècle, peut-être issu de l’ancien français mijot, « lieu où l’on fait mûrir les fruits sur la paille ». Il est apparenté à mijolée, mot dialectal de l’Ouest signifiant « cajoler », lui-même lié à la mijaurée, « qui fait des manières ». Issu du même dialecte, son synonyme mitonner est formé sur miton, le morceau de mie de pain. On imagine la formule mijoter un sale coup prononcée par un traître au dos rond se frottant les mains, il y a une idée de mûrissement que l’on retrouve dans le nom des bœuf-carottes, cette police des polices qui passe pour faire « mijoter » les prévenus.

pote-au-feu

Les plats mijotés nourrissent les locutions, symbolisant une tranquillité bonasse. La cuisine militaire et ses grandes marmites ont donné le mot popote, synonyme de pot-au-feu : les deux évoquent un côté casanier, attaché à la routine ronronnante du foyer.

Par métonymie, le pot-au-feu désigne le couple « régulier ». Dans les Culottes rouges d’Alphonse de Launay paru en 1883, on lit ce reproche : « Si j’avais pu songer qu’un jour viendrait où vous me lâcheriez pour le pot-au-feu conjugal, pensez-vous que j’eusse abandonné pour vos beaux yeux mon amant ? » Cuisinés avec amour, les rassurants plats mijotés ont des noms à leur image : la blanquette du commissaire Maigret, le bourguignon de mémé ou le veau Marengo du bistrot, une recette inventée en 1800.

napoléon et Marengo

Le petit Corse vient alors de remporter une bataille contre les Autrichiens dans cette ville du Piémont, et il a faim! Pour combler l’impérial petit creux, son chargé de table Dunand lui sert un plat de fond de placard : un poulet aux tomates et aux œufs frits, écrevisses et croûtons. Bonaparte goûte fort ce plat, mais comme il n’a aucun palais, il ne voit pas que son cuistot remplace peu à peu le poulet par du veau, les écrevisses par des champignons et les œufs par des oignons et du vin blanc. Et un Marengo pour l’empereur, un!

Extrait de
« 150 Drôles d’expressions de la cuisine qui ne manquent pas de sel »
avec l’amicale autorisation de l’auteure Marcelle RATAFIA

Éditions
321 pages, 12,90€

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