Chaque samedi, Les Buvologues vous proposent de découvrir les origines d’expressions du langage courant qui nous viennent de la cuisine. Et cela ne manque pas de sel…
haut poteau
Poteau parfois graissé et couronné d’un cercle auxquels pendent saucissons, bouteilles et friandises, le mât de cocagne est une attraction de foire qu’on grimpe pour attraper ces lots. Déconseillée aux personnes affligées de vertige, cette tradition a tendance à devenir rare!
La recherchée cocagne signifie « réjouissance ». Elle serait venue d’un pays imaginaire où les saucisses poussent aux arbres, où du vin jaillit des fontaines et où le plaisir est garanti et le labeur proscrit : l’équivalent d’un Bora-Bora nourrissant au Moyen Âge. Un fabliau français de 1250 parle d’un pays où règnent tous les plaisirs. Un vers le résume : « Qui plus i dort, plus i gagne. » Au XIVème siècle, Boccace évoque dans son Décaméron un pays merveilleux où les saucisses abondent et où coule un ruisseau de Malvoisie – du vin blanc.
cocagne/cocaïne
Apparue au XII ème siècle, la quoquaigne serait peut-être formée sur l’italien cuccagna, lui-même possiblement issu du moyen néerlandais kokenje, un petit gâteau qu’on donne aux enfants les jours de foire. En France, la cocanha, en langue d’oc, est le « pain de pastel », cette teinture bleue qui fit la fortune du Lauragais et de l’Albigeois en épuisant leurs sols, territoires surnommés Pays de Cocagne pour leur opulence.
un pays imaginaire
Paradis des gourmands, le Pays de Cocagne devient, sous le pinceau de Bruegel l’Ancien, une critique des flemmards. Dans ce célèbre tableau de 1567, le maître flamand compose un paysage champêtre où sont affalés un clerc, un soldat et un paysan, ronflant sous un arbre où sont accrochées des jarres de vin et des tourtes, entourés de galettes, d’un cochon saigné et d’éléments fabuleux. Le peintre donne envie dans ce tableau généreux et paisible, mais se fait moraliste : il n’est pas bon de rêver à ce que tout nous tombe rôti dans le bec.
Le fait de mener la douce vie de cocagne semble effectivement immérité, voire confiner à la débauche. Elle est alors proche d’expressions telles que mener une vie de bâton de chaise ou de patachon, ce conducteur réputé fêtard d’une diligence appelée patache!
. . . . . . .
Extrait de
« 150 Drôles d’expressions de la cuisine qui ne manquent pas de sel »
avec l’amicale autorisation de l’auteure Marcelle RATAFIA
Pas de commentaires