« Rendre son tablier « mais pas taché d’accord ?


Chaque samedi, Les Buvologues vous proposent de découvrir les origines d’expressions du langage courant qui nous viennent de la cuisine. Et cela ne manque pas de sel…

Accessoire distinctif de la domesticité mais aussi des chefs, le tablier se rend parfois. Au XVIII ème siècle, l’expression existait déjà sous la forme quitter son tablier et s’appliquait aux gens de maison, désignant métaphoriquement un domestique qui quitte sa place. Elle évolue vers rendre son tablier, dans le sens de « démissionner » à la fin du XIX ème siècle, époque où la domesticité était à son apogée. Le « larbin » pouvait ainsi jeter son uniforme à la figure de son employeur avant de claquer la porte.

Plus subversive que jeter l’éponge, une locution issue du monde de la boxe, elle est aujourd’hui plutôt employée de façon ironique pour désigner la désaffection de hautes fonctions. Sa traduction dans les autres langues est des plus réjouissantes : on dira « mettre le violon dans le toit » en hébreu, « accrocher la lyre aux saules » en néerlandais ou « se couper la petite natte » en espagnol.
Le tablier, formé sur tabula, la tablette d’écriture en latin, est présent dans d’autres formules plutôt amusantes. Ainsi, on peut dire d’un vêtement mal choisi qu’il va à la personne comme un tablier à une vache, telle l’improbable tenue de Merveilleuse du Directoire arborée par le fameux Bœuf à la mode, un célèbre bouillon parisien qui aimait ridiculiser son bovin totem.

À Lyon, une spécialité très appréciée et pas franchement allégée consiste à paner dans du beurre du gras-double mariné, c’est-à-dire de la fraise de bœuf, pour la servir avec une sauce gribiche. Ancien sapeur de génie et gouverneur militaire sous Napoléon III, le maréchal de Castellane était un « tripophile » et grand amateur de ce plat qu’il surnomma « tablier de sapeur », car il lui trouvait une ressemblance avec le tablier de cuir des sapeurs-pompiers. Au feu ! Ce tablier ignifugé finit par donner son nom à une toison pubienne abondante chez une femme, rendant ainsi hommage à la barbe fournie arborée autrefois par les soldats du feu.

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Extrait de
« 150 Drôles d’expressions de la cuisine qui ne manquent pas de sel »
avec l’amicale autorisation de l’auteure Marcelle RATAFIA

Editions
317 pages, 12,90€

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