« Mettre du beurre dans les épinards »mais pas dans le pinard!


Chaque samedi, Les Buvologues vous proposent de découvrir les origines d’expressions du langage courant qui nous viennent de la cuisine. Et cela ne manque pas de sel…

plat d’école

Boudé à la cantine, l’épinard bouilli est vécu comme une punition par les enfants – en particulier s’il est servi en garniture du répugnant « œuf dur chaud, sauce aurore ». Dans épinard, on entend épine, donc il pique! Pourtant, l’épinard est apprécié des gastronomes. Dans son Grand dictionnaire de cuisine, Alexandre Dumas prend la défense de ce beau brin injustement diabolisé : « On a fait beaucoup de plaisanteries sur l’épinard, qui n’a, dit-on, aucune propriété alimentaire et qui a été qualifié de balai de l’estomac ; c’est une erreur. »

époque italienne

Un plat dit « à la florentine » comportant des épinards ; on pourrait penser que l’épinard est toscan. Cette appellation évoque la ville d’origine de Catherine de Médicis, qu’elle quitta en 1533 pour apporter des légumes à la cour de France. Dans la Toscane agricole de la Renaissance, l’épinard poussait effectivement comme du chiendent ; il faisait partie des légumes que l’on mélangeait à l’épeautre et aux haricots blancs typiques de la cuisine pauvre et roborative de la région.

lassé de l’Asie

En réalité, cette feuille d’un vert intense est originaire d’Asie Mineure, plante sauvage peu à peu domestiquée par les Perses. L’épinard est introduit en Europe un peu avant l’an mille par les Arabes qui l’importent en Andalousie. En arabe espagnol, on l’appelle isbinâkh, l’ »épine »; transformé en espinaca en espagnol, il devient espinarde en français. Au XIX ème siècle, l’épinard entre dans deux locutions : un plat d’épinards est un mauvais tableau où l’on a abusé du vert, tandis que mettre du beurre dans les épinards, c’est apporter un peu d’argent supplémentaire, en se livrant à une prostitution occasionnelle par exemple : « Si elle se défendait c’est qu’elle le voulait bien. Et puis comme on dit, ça mettait un peu de beurre dans les épinards », peut-on lire dans le roman De la boue et des roses de Victor Victus en 1953.

Celui qui n’a pas besoin de mettre du beurre dans ses épinards, c’est le marin dont l’arme fatale est une boîte de conserve. Personnage de dessin animé apparu dans les années 1930, Popeye passe pour avoir contribué à donner l’image d’un légume bourré de fer. Un aimable mythe qui a poussé les parents à en glisser dans les petits pots!

Extrait de
« 150 Drôles d’expressions de la cuisine qui ne manquent pas de sel »
avec l’amicale autorisation de l’auteure Marcelle RATAFIA

. . . . . . . . .

Editions
317 pages, 12,90€

Précédent La maison Albert bichot prend le grand large!
Suivant BBB : comme une avalanche de Beaujolais!

Pas de commentaires

Répondre