Chaque samedi, Les Buvologues vous proposent de découvrir les origines d’expressions du langage courant qui nous viennent de la cuisine. Et cela ne manque pas de sel…
L’es-tu ?
De la même famille étymologique que sel, le mot salade est une francisation de l’insalata transalpine, formée sur insalare, « saler » en latin. L’Italie est le terroir ami de la roquette, cette pousse sauvage au goût prononcé qui donne du coffre au mesclun. Encore aujourd’hui, on sale abondamment les salades vertes en Italie ! Fort représentée au figuré dans la langue française, la salade est le plus souvent employée dans des expressions péjoratives. On dit ainsi que la beauté ne se mange pas en salade, sous-entendant qu’on n’a pas besoin d’être beau pour être potable. Préférer en salade, c’est détester ; le panier à salade, en argot, c’est entre autres le fourgon de police dans lequel on se trouve aussi secoué qu’une batavia, paraît-il. Dans Hôtel du Nord, une Arletty furieuse peste ainsi contre les naïfs qui fêtent le 14 Juillet : « Ils ont pris la Bastille, et après ? Y a tout de même des paniers à salade ! « , ce qui implique que malgré la liberté acquise, la police est toujours là.
Sacrée salade !
Venue de l’argot du spectacle, la formule vendre sa salade s’est d’abord dite d’un artiste faisant son boniment, cet ancêtre gueulard des fake news. Ce qui fait de cette salade un tissu de mensonges, c’est son aspect composite, que l’on retrouve dans le mesclun ou les salades composées. Cette diversité cosmopolite est palpable dans le nom de la salade dite macédoine. Ce plat froid de légumes à la mayonnaise prend le nom de l’ancien royaume d’Alexandre le Grand dans les Balkans, connu pour abriter de nombreux peuples : Slaves, Grecs, Bulgares… Au XVII ème siècle, quelque chose de très mélangé passait pour être « bigarré comme la Macédoine ». « Cette fois-ci, il n’y couperait plus, le sale môme : il était bon comme la romaine ! », lit-on dans Au Poiss’ d’or, œuvre d’Alec Scoffi, auteur adulé par Modiano assassiné en 1932. Cette réjouissante expression un peu perdue de vue était très utilisée dans le Milieu au XX ème siècle. Elle n’a en revanche rien à voir avec Anna Magnani : être bon comme la romaine, c’est être aussi tendre qu’une laitue romaine prête à être croquée. Par extension, elle s’emploie pour dire que l’on est arrêté ou dans une situation sans issue. Dans quelle salade on se fourre !
Pas de commentaires