« faire un four » mais sans les petits qui vont avec…


Chaque samedi, Les Buvologues vous proposent de découvrir les origines d’expressions du langage courant qui nous viennent de la cuisine. Et cela ne manque pas de sel…

chaud devant

Quand un critique de théâtre prédit à une nouvelle pièce de faire un four, ça ne veut pas dire qu’elle va brûler les planches. Au contraire, cela signifie qu’elle va, comme on peut l’entendre dans la langue familière, se prendre un bide. Le mot four est issu du latin furnus, un torride étymon qui a donné fournéefournaiseéchauffourée, mais aussi… fornicationFurnus serait apparenté à fornix, qui en latin désignait les chambres où logeaient les prostituées romaines, voûtées comme des fours à pizza.
En langue verte, four et boulanger sont associés aux Enfers : la faute, certainement, à l’obscurité qui y règne, éclairée parfois par la lueur rougeoyante de flammes succubes. Dans l’argot du théâtre, l’expression faire four serait apparue au XVIIème siècle.

pièces obscures

À l’époque, les salles obscures n’étaient pas les cinoches où on se calfeutre avec un cornet de pop-corn ; le public du théâtre se ramenait armé de pommes pour punir les comédiens médiocres. Les plus mauvais d’entre eux se retrouvaient parfois avec un parterre de spectateurs tellement clairsemé que le régisseur décidait d’arrêter les frais : en l’occurrence, de couper l’éclairage pour faire des économies de bougie. Une fois les chandelles mouchées, il faisait noir… comme dans un four !

Née de la débâcle des soirs de billetterie maussade, l’expression faire four évolue en faire un four : loin du dicton « on ne peut être à la fois au four et au moulin », cette formule devient la bête noire des dramaturges. En 1839, elle apparaît dans Le Monde dramatique, dans un article dédié à l’argot dramatique : « Cette non-réussite [d’une balançoire] se nomme faire four ! – Bienheureux encore lorsque deux ou trois vigoureux coups de sifflet ne viennent pas rendre le four complet ». Pour encourager le public, on engage parfois la « claque », ces mercenaires de l’applaudissement – ou de la huée, selon la commande– chargés de sauver une pièce par leur enthousiasme feint.

. . . . . . . .

Extrait de
« 150 Drôles d’expressions de la cuisine qui ne manquent pas de sel »
avec l’amicale autorisation de l’auteure Marcelle RATAFIA
.

Editions
317 pages, 12,90€

Précédent Albert Sounit, le réveil de la bulle endormie
Suivant Verticale de Montrachet au domaine Jacques Prieur, ou comment tutoyer les étoiles!

Pas de commentaires

Répondre