« Prendre une sacrée ratatouille » sans s’endormir dessus !


Chaque samedi, Les Buvologues vous proposent de découvrir les origines d’expressions du langage courant qui nous viennent de la cuisine. Et cela ne manque pas de sel…

Avant qu’un rat cordon-bleu de dessin animé n’apprenne aux Américains la bonne façon de prononcer ce mot à l’accent provençal, la ratatouille a connu des hauts et des bas. Si elle désigne aujourd’hui communément une recette niçoise de légumes du Sud mijotés à l’huile d’olive, il n’en a pas toujours été ainsi !
Surgie en 1778 lors d’un siècle des plus gourmets, la ratatouille n’est pas prête à s’afficher au menu de la Cour. Peut-être formée sur le verbe tatouiller, remuer la boue, ou ratouiller, troubler l’eau, du verbe latin tudicare qui a donné touiller, cette terminaison à la rime riche mais pas très distinguée désigne n’importe quel ragoût, salmigondis ou fricassée.

En 1851, Ambroise Garneray, peintre, aventurier et corsaire, décrit dans Un corsaire au bagne ce troc peu ragoûtant : « Un autre industriel, ambulant aussi, le marchand de ratatouille (c’était le mot), échangeait contre un peu de son ignoble nourriture le produit de ses vêtements. »

Synonyme de tambouille, cette mixture aussi douteuse que grossière est le quotidien des prisons et des casernes. En 1851 dans Le Chemin de l’épaulette : histoire de l’enrôlé volontaire d’Auguste Lecomte, on peut lire que « le mot ratatouille, dont on fit par abréviation rata, se propagea rapidement dans l’armée, où il est devenu proverbial pour indiquer une mauvaise chère ». Dans les rangs, le caporal en charge de la cuisine devient le redouté « cabot rata » pour caporal-ratatouille. Équivalent stylé de la caponata sicilienne ou turlu turc, la ratatouille n’a de raffiné que la recette.

Dans le langage, elle est plutôt liée à l’écrasement du turlu, comme dans la formule prendre une ratatouille, métaphore de la volée de coups qui laisse les couleurs des champs de Provence sur le visage. Elle sert aussi à illustrer des pratiques louches : ainsi la ratatouille peut servir à nommer des malversations. En revanche, ne pas s’endormir sur la ratatouille, c’est avoir un bon coup de fourchette !

Extrait de
« 150 Drôles d’expressions de la cuisine qui ne manquent pas de sel »
avec l’amicale autorisation de l’auteure Marcelle RATAFIA

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Editions
31è pages, 12,90€

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