Chaque samedi, Les Buvologues vous proposent de découvrir les origines d’expressions du langage courant qui nous viennent de la cuisine. Et cela ne manque pas de sel…
depuis les Romains
A Rome, Pline l’Ancien avait un goût immodéré pour la purée de fèves. Au Moyen Âge, la porée est invariablement faite à partir de pois ou de fèves et plutôt liquide. Mot du moyen français, porée est formé sur le verbe purer, « rendre pur », qui signifiait nettoyer puis passer au crible, ou passer des légumes. Liant utilisé dans les bouillons ou les coulis pour les viandes, la purée devient plus recherchée au XVIIème siècle. Les cuisiniers commencent à écraser des légumes divers mais elle reste associée au potage. Même si les légumes continuent d’être servis en morceaux, c’est véritablement au xviiie siècle qu’apparaissent les premières recettes de purées. Au XIXème siècle, on trouve des purées de tous les légumes, et surtout de la pomme de terre, boudée jusqu’à sa domestication par Parmentier juste avant la Révolution.
Feu !
L’énergique formule balancer la purée signifie « tirer avec une arme à feu », mais aussi « déféquer » et « éjaculer », deux façons de lâcher des sécrétions. Rien à voir avec la purée dans laquelle on se met : celle-là, gluante et désespérante, a pour synonyme la dèche, la panade ou la mouise, cette bouillie collante. Pas tellement distinguée comme sa cousine la mousseline, la purée de patate fait pauvre : on la sert en accompagnement de plats ménagers sans y prêter tellement attention ; elle recouvre les hachis. Plat de temps difficiles, elle finit par désigner la misère elle-même, épaisse et aveugle comme la « purée de pois », ce brouillard sombre dû à la poussière de charbon. Le malheureux qui est « dans le dix de purée » est appelé purot« , en référence à la purée dans laquelle il se débat, là où le Néerlandais, plus inspiré, dira qu’il est « gêné par les poires frites ».
Dans les années 1980, c’est le chef étoilé Joël Robuchon qui en fait tout un plat, et même son plat signature : une recette comportant une part de beurre si obscène qu’il finira par se défendre : « Je ne mets pas autant de beurre dans ma purée qu’on le dit. »
Extrait de
« 150 Drôles d’expressions de la cuisine qui ne manquent pas de sel »
avec l’amicale autorisation de l’auteure Marcelle RATAFIA
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