« à couper au couteau » comme un morceau de brouillard…


Chaque samedi, Les Buvologues vous proposent de découvrir les origines d’expressions du langage courant qui nous viennent de la cuisine. Et cela ne manque pas de sel…

Merci Richelieu!

Objet personnel au Moyen Âge, le couteau se portait autrefois virilement à la ceinture. Parmi les couteaux destinés à la table, on trouve les solides parepains, destinés à « chapeler » le pain et couper les tranchoirs ; des
couteaux à imagerie aux manches ornés ; le kenivet, couteau de poche qui a donné le mot canif ; et même des couteaux à huîtres!
On raconte que Richelieu en avait ras-la-calotte de voir ses commensaux se curer les dents avec la pointe de leur couteau. Aux environs de 1610, le délicat cardinal commanda à son maître d’hôtel de limer la pointe de ces ustensiles ; sécurisant et pas facile à insérer entre deux chicots, le couteau à bout arrondi fit alors un carton jamais démenti sur les tables.

naissance latine

Apparu au début du XIV ème siècle sous la forme coltel, le couteau est issu du latin culter, signifiant le fer tranchant du soc de la charrue. Il tranche depuis lors dans des locutions… aiguisées. Le couteau est parfois associé à la menace ou la douleur : on met le couteau sous la gorge, on remue le couteau dans la plaie. Au XVIIème siècle, celui qui apportait des arguments contre lui-même « se coupait de son propre couteau ».

On parle de second couteau pour désigner le sous-fifre, le subalterne aux manières louches. L’expression viendrait du fait que les couteaux servaient d’outils ou d’armes et qu’ils furent utilisés ensuite pour manger. On pourrait taxer le César joué par Raimu ou le député Jean Lassalle d’avoir un accent qui, comme le vrai
tartare, est à couper au couteau : cette formule imagée dit bien la solidité de ces intonations ô combien denses.

multi-lames

Objet indissociable de la table comme de la cuisine, le couteau est l’attribut du boucher. Cette corporation est réputée aussi virtuose pour sa maîtrise de la découpe que celle de la langue, elle en a même inventé une ! Le louchébem, qui signifie « boucher » dans ce saignant crypto-langage. On place la première lettre à la fin, dans le but de ne pas être compris : c’est ainsi qu’on part en loucedé, en douce, ou qu’on trouve quelqu’un loufoque – fou. En argot, le couteau est un objet précieux qui bénéficie d’une palanquée de blazes : le lingue, le chourin ou l’eustache, ce petit couteau de poche prisé des Apaches.

Extrait de
« 150 Drôles d’expressions de la cuisine qui ne manquent pas de sel »
avec l’amicale autorisation de l’auteure Marcelle RATAFIA

. . . . . . . .

Editions
317 pages, 12,90€

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