Il nous avait prévenu la veille lors de notre interview, « L’énergie que j’ai, je ne vais pas pouvoir la cacher longtemps! » L’acteur a fait tomber le record détenu par Marc Lavoine en 2020. Retour sur les moments forts d’une vente historique.
Une entrée soignée
A voir répéter hier les équipes de Sotheby’s* dans des halles vides, qui aurait pu prévoir que le lendemain la salle allait vivre une vente aussi pleine.
A 14 H30 une musique d’accueil façon « Nuit des Césars » emplissait une salle presque pleine. Un changement sonore qui accompagnait un décor revisité dans des tons beige et une nouvelle tribune où les lettres Sotheby’s se détachaient. Les panneaux d’affichage des lots à la vente avaient aussi mué. Laissant les devises étrangères plus nombreuses mais les euros bien en avant.
Autre nouveauté, une photo de chaque fût annonçait la cuvée à venir.
Plus surprenant, une partie des acheteurs, soixante-dix pour être précis, enchérissaient en direct depuis les Hospices de l’autre côté de la rue.
Quand on sait qu’il se trouvaient dans la célèbre « Salle des Pôvres » (la pièce où les soeurs hospitalières soignaient les malades dans des lits à baldaquins) on pourra bientôt la rebaptiser. Nous vous laissons le soin de trouver le nom.
Un bon démarrage
Dès la première pièce de vin mise en vente, un Beaune 1er cru « Dames Hospitalières » la hausse prévisible et attendue s’affichait. De 12000€ l’an passé on terminait à 17 000€ soit presque 42% d’augmentation. Les lots qui suivirent confirmèrent la tendance haussière. Pendant près de deux heures les futs partaient au compte-goutte. L’animal Marmaï rongeait son frein et noyait l’attente dans un verre de blanc de Bourgogne posé bien en évidence. Quand la dynamique commissaire-priseur Aurélie Masson claqua du marteau sur les premier lots de Grand cru les applaudissement retentirent comme si arrivait l’heure de la Pièce des Présidents. Quand soudain…
Les acteurs Pio Marmaï et Jeanne Balibar entourent Mattia Tabacco, l’acheteur du groupe Oeno qui vent de mettre la main sur la convoitée Pièce des Présidents (Photo G.Baroin ©)
« Think! »
La chanson d’Aretha Franklin résonne dans la salle. Sans « réfléchir » Pio Marmaï s’empare du micro pour ne plus le lâcher. Il abandonne sa consoeur Jeanne Balibar sur le bord de la tribune et commence à interpeler les acheteurs. D’accord, ce n’est pas très élégant mais l’acteur va vite se rattraper…
A force d’injonctions pleines de vitalité le comédien exhorte la masse des 700 acheteurs à être généreux. Le « C’est pas du Bordeaux, c’est du Bourgogne » fait mouche et fera date. La première des trois bougies n’a pas fini de brûler que déjà la somme de 500 000 euros est atteinte. « A 520 000 je me brûle le bras » enchaîne t-il tout en tendant sa main en direction de la bougie. La salle croule de rire. C’est à ce moment qu’intervient Mattia Tabacco du fond de la salle. Les acheteurs principaux étant traditionnellement situés devant la scène, on pense à ce moment que la flamme va s’éteindre à la prochaine surenchère mais c’était sans compter sur les motivations bien réelles du jeune anglais en jean. Albéric Bichot contre à 550 000€.
Ça va faire mal…
L’acteur s’exécute tend son bras au-dessus de la flamme avant de l’enlever aussitôt en disant : » Aïe, aïe, aïe, ça fait super mal! ». La salle est au spectacle. Le britannique revient du fond avec une enchère à 580 000€. Bichot réplique.
On est à 600 000€. L’animal à barbe drue lance, « Allez on avance j’ai pas que ça à F….E! » Les duettiste du jour se renvoient la balle par tranche de 10 à 20 000€. L’acteur « chaud bouillant » propose pour 30 000€ « d’aller manger avec lui une pizza chez Pizza Pino sur les Champs Elysées ». Et ça marche… 650 000€ ! Il exhorte la salle « On est où ici, on est à… ? « et la salle de répondre comme un seul homme « Beaune! »
Le record de 2010 est largement battu. « C’est qui qui avait le record…? ah oui Luchini! Et bien Luchini allez, rentre chez ta mère! » Bon ça c’est fait.
Les Halles se lèvent. Les applaudissement battent la cadence et rythment les montées de prix… 700 000€ puis 730, 740… On met sur pause. « Il se passe quelque chose… » dit Pio « Il est historique ce moment? »
Oui maintenant ça l’est.
Un acheteur propose 750 000€ « En mémoire de monsieur Jacquet » (l’ancien directeur de l’hôpital de Beaune). Applaudissements de rigueur.
760 000! « Le 178 il en une grosse paire celui-là et un sacré portefeuille! » Tance l’acteur. « Imaginez la vente des vins l’an prochain, vous allez vous faire chier comme des rats… » Marmaï style.
Un final de feu
Des 780 000€ d’Albéric Bichot, Mister Tabacco fait une bouchée ronde : 800 000 €! La commissaire-priseur passe le marteau à Jeanne Balibar qui rate le bloc et frappe le pupitre. L’émotion sans doute. Adjugé! Record battu.
Pas perfide pour un sou, Albion emporte la mise. « Bien joué messieurs les anglais » semble glisser à l’oreille Albéric Bichot, toujours fair play au moment où ces derniers montent se présenter en tribune.
Mattia Tabacco, le gagnant du jour prend la parole en anglais, relayé et traduit par son collègue Olivier Gasselin, le directeur des ventes de la restauration du groupe Oeno. Il explique que la cause des femmes est chère au sein de leur entreprise où elles sont nombreuses à travailler. Et ajoute que sa mère étant atteinte d’un cancer du sein, il se sent concerné au premier chef.
Au-delà du talent d’orateur-animateur d’un Pio Marmaï flamboyant, il fallait un petit millésime en quantité et deux grands coeurs pour faire de ce 21 novembre une date historique dans l’histoire du vin de Bourgogne. C’est chose faite.
… jusqu’au prochain record.
Guillaume Baroin
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