« Mettre les pieds dans le plat » : mais pas au four!


Chaque samedi, Les Buvologues vous proposent de découvrir les origines d’expressions du langage courant qui nous viennent de la cuisine. Et cela ne manque pas de sel…

Vrai couteau suisse de la langue, le plat recouvre une plâtrée de significations. En cuisine, il désigne à la fois contenant et contenu, et même des recettes : on parle bien d’ « œufs sur le plat ». Issu assez platement du latin populaire plattus dérivé du grec platus « large et plat, étendu », il est rattaché à la même racine que le mot latin planta, la « plante du pied ». C’est dire s’il en a sous le pied !


Si le bon petit plat comme le plat du jour évoquent la fameuse bonne franquette, un grand plat est un sommet de gastronomie ! Dans son roman Les Beaux Quartiers, Aragon décrit en 1936 une hôtesse qui préfère servir les plats d’un grand traiteur que ceux de son cuisinier : « Elle avait mis les petits plats dans les grands, disait-elle […]. Mais elle n’était pas très sûre de son cordon-bleu, et elle avait tout fait venir de chez Potel et Chabot. »


Comme les œufs mayo et les concombres à la crème, la vengeance est, selon l’aveu du sérieux Paul Claudel, « un plat qui gagne à être mangé froid ». C’est ainsi que les peuples connus pour leur amour de la vendetta – Corses, Siciliens ou Albanais – ont le secret de fraîches entrées. Apparue à la fin du Moyen Âge, cette proverbiale métaphore devient fort courante au XIX ème siècle ; elle souligne à la fois le temps que prend une vengeance – plus long qu’il n’en faut à un plat pour refroidir, et l’absence de passions qu’il convient de ressentir pour se venger convenablement.

Elle est proche en cela de l’expression « servir un plat de sa façon », maligne image un peu datée pour dire qu’on va jouer un tour gratiné à quelqu’un. Si un plat d’épinard est un paysage peint au vert agressif et un plat de nouilles quelqu’un de mou du genou, c’est à la fin du XVIII ème siècle qu’apparaît le plat de résistance. Rien à voir avec Lucie Aubrac ! Il est ainsi nommé car on n’en vient pas facilement à bout. Aujourd’hui, il désigne le plat principal. Au XIX ème siècle apparaît la formule mettre les pieds dans le plat, synonyme culinaire de « jeter un pavé dans la mare ».
Le plat en question désigne plutôt un plan d’eau boueuse. On imagine pourtant aisément un convive piétiner un beau plateau sous l’œil effaré de la tablée !

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Extrait de
« 150 Drôles d’expressions de la cuisine qui ne manquent pas de sel »
avec l’amicale autorisation de l’auteure Marcelle RATAFIA

Editions
317 pages, 12,90€

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